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Date de la décision :

Le 8 décembre 2023

 

Référence :

Sallstrom c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2023 TPEC 12

Numéro de dossier du TPEC :

0001-2023

 

Intitulé :

Sallstrom c. Canada (Environnement et Changement climatique)

Demandeur :

Charles Sallstrom

 

Défendeur :

Ministre de l’Environnement et du Changement climatique

Objet de la procédure : Révision, au titre de l’article 15 de la Loi sur les pénalités administratives en matière d’environnement, L.C. 2009, ch 14, art 126, d’une pénalité infligée en vertu de l’article 7 de cette loi relativement à une violation de l’alinéa 37(2)b) du Règlement sur les oiseaux migrateurs (2022), DORS/2022-105, pris en vertu de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch 22.

Instruit :

Par écrit

 

Comparutions :

 

 

Parties

 

Avocat ou représentant

Charles Sallstrom

 

Pour son propre compte

Ministre de l’Environnement et du Changement climatique

Jan Verspoor (avocat)

DÉCISION RENDUE PAR :

HEATHER MCLEOD-KILMURRAY

 


 

Introduction

[1]          Selon l’Exposé conjoint des faits partiel, le 28 décembre 2022, le demandeur Charles Sallstrom et un ami parcouraient en canot le marais Pitt-Addington, à Pitt Meadows, en Colombie-Britannique, qui, comme les parties en conviennent, est une destination de chasse connue. M. Sallstrom était en possession d’un fusil de chasse. Lorsque les deux hommes sont arrivés sur la rive, les agents de la faune Andrew Smith et Kyle Flindt les ont accostés. À leur demande, M. Sallstrom leur a remis son permis de chasse, son permis de conduire et son fusil de chasse. M. Sallstrom n’avait aucun oiseau migrateur en sa possession.

[2]          L’agent de la faune Smith a ensuite émisle procès-verbal no 9500-8258 d’un montant de 400 $ au demandeur, par application du paragraphe 10(1) de la Loi sur les pénalités administratives en matière d’environnement, L.C. 2009, ch 14, art 126 (la « LPAME »), pour une violation de l’alinéa 37(3)b) du Règlement sur les oiseaux migrateurs (2022) (le « Règlement »), pris en vertu de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch 22 (la « Loi »). (Le procès-verbal a été émispar erreur en tant que violation de l’alinéa 37(2)b) du Règlement, mais l’alinéa a par la suite été changé pour l’alinéa 37(3)b).)

Lois applicables

Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch 22

13.01 (1) Commet une infraction quiconque contrevient :

a)      à toute disposition de la présente loi ou des règlements, à l’exception d’une disposition dont la contravention constitue une infraction aux termes du paragraphe 13(1).

Règlement sur les oiseaux migrateurs (2022), DORS/2022-105

37 (1)  Il est interdit de chasser les oiseaux migrateurs considérés comme gibier sauf en utilisant :

c)      soit un fusil de chasse de calibre 10 au maximum qui remplit l’une des conditions suivantes :

(i)     il est conçu pour ne pas contenir plus de trois cartouches à la fois,

(ii)    sa capacité a été réduite par le tronçonnage, la modification ou l’obturation du chargeur à l’aide d’un bouchon de métal, de plastique ou de bois d’une seule pièce qui ne peut s’enlever que si le fusil est démonté, de sorte que le chargeur et la chambre du fusil ne puissent ensemble contenir plus de trois cartouches à la fois.

37 (3) Il est interdit de chasser les oiseaux migrateurs considérés comme gibier en ayant en sa possession sur le lieu de chasse :

b)     un fusil de chasse autre que celui visé à l’alinéa (1)c).

Règlement sur les pénalités administratives en matière d’environnement, DORS/2017‑109

2 (1) La contravention à toute disposition d’une loi environnementale ou de ses règlements figurant à la colonne 1 de l’annexe 1 est désignée comme une violation punissable au titre de la Loi.

Article 3 : Il s’agit d’une violation de type B aux termes du Règlement, donc

4 (1) Le montant de la pénalité applicable à une violation de type A, B, ou C est calculé selon la formule suivante :

W + X + Y + Z

où :

W représente le montant de la pénalité de base prévu à l’article 5;

X le cas échéant, le montant pour antécédents prévu à l’article 6;

Y le cas échéant, le montant pour dommages environnementaux prévu à l’article 7;

Z le cas échéant, le montant pour avantage économique prévu à l’article 8.

Annexe 1

Partie 4, Section 2, Article 34 – une violation à l’alinéa 37(3)b) du Règlement sur les oiseaux migrateurs est une violation de type B.

Questions en litige

[3]          Le Tribunal est chargé de déterminer, selon la prépondérance des probabilités, (i) si la violation prétendue dans le procès-verbal a été commise (art 20 de la LPAME) et (ii) si l’amende imposée a été calculée conformément au Règlement sur les pénalités administratives  en matière d’environnement, DORS/2017-109.

Analyse et constatations

[4]          Pendant une conférence préparatoire à l’audience tenue le 10 août 2023, M. Sallstrom a fait valoir de vive voix que son fusil de chasse n’était pas chargé et qu’il n’avait tiré sur aucun animal. Il a soutenu qu’il ne chassait pas et qu’il n’avait jamais chassé dans ce lieu auparavant.

[5]          Le paragraphe 20(2) de la LPAME prévoit qu’il appartient au ministre d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que la violation prétendue a été perpétrée.

[6]          Le ministre affirme que la pénalité a été infligée à M. Sallstrom en vertu de l’alinéa 37(3)b) du Règlement sur les oiseaux migrateurs (2022), selon lequel « [i]l est interdit de chasser les oiseaux migrateurs considérés comme gibier en ayant en sa possession sur le lieu de chasse […] b) un fusil de chasse autre que celui visé à l’alinéa (1)c).

[7]          L’alinéa 37(1)c) décrit le type de fusil de chasse qu'une personne peut avoir en sa possession lorsqu’elle chasse les oiseaux migrateurs considérés comme gibier : « Il est interdit de chasser les oiseaux migrateurs considérés comme gibier sauf en utilisant : […] c) soit un fusil de chasse de calibre 10 au maximum qui remplit l’une des conditions suivantes : (i) il est conçu pour ne pas contenir plus de trois cartouches à la fois, (ii) sa capacité a été réduite par le tronçonnage, la modification ou l’obturation du chargeur à l’aide d’un bouchon de métal, de plastique ou de bois d’une seule pièce qui ne peut s’enlever que si le fusil est démonté, de sorte que le chargeur et la chambre du fusil ne puissent ensemble contenir plus de trois cartouches à la fois. »

[8]          Autrement dit, il est permis de chasser les oiseaux migrateurs considérés comme gibier en utilisant un fusil de chasse d’un calibre 10 au maximum qui ne peut pas contenir plus de trois cartouches à la fois ou dont la capacité a été réduite à trois cartouches de la manière décrite ci-dessus. Le chargeur et la chambre du fusil de chasse de M. Sallstrom pouvaient ensemble contenir plus de trois cartouches.

[9]          Pour que les paragraphes 37(1) et 37(3) puissent s’appliquer, une personne doit « chasser » les oiseaux migrateurs considérés comme gibier. Le mot « chasser » n’est pas défini dans la Loi, mais il est défini au paragraphe 1(1) du Règlement sur les oiseaux migrateurs (2022) :

« chasser Pourchasser, poursuivre, traquer, suivre un oiseau migrateur ou être à son affût, ou tenter de quelque manière que ce soit de capturer, de tuer, de prendre, de blesser ou de harceler un oiseau migrateur, que l’oiseau soit ou non capturé, tué, pris, blessé ou harcelé. »

[10]       Ayant appliqué ce critère aux faits, ECCCsoutient que [traduction] « se trouver dans un lieu de chasse aux oiseaux migrateurs connu en ayant en sa possession un fusil de chasse correspond à la définition prévue par la Loi de chasser, plus précisément, à l’expression « être à l’affût d’un oiseau migrateur ». Il n’est pas nécessaire de prouver qu’un oiseau migrateur a été capturé, tué, blessé ou harcelé ». Le ministre ajoute : [traduction] « M. Sallstrom a dit à l’agent Smith qu’il n’avait jamais chassé la sauvagine auparavant et que son ami l’accompagnait, mais que ce dernier ne chassait pas ». Selon le ministre, ces propos de M. Sallstrom indiquent que « M. Sallstrom chassait les oiseaux migrateurs ce jour-là, qu’il ait tiré ou non ou qu’il ait tué ou non un oiseau migrateur ».

[11]       Finalement, M. Sallstrom n’a pas contesté le fait que le chargeur et la chambre du fusil de chasse qu’il avait en sa possession pouvaient ensemble contenir plus de trois cartouches. Il a plutôt fait valoir que le fusil n’était pas chargé. Cependant, l’alinéa 37(3)b) du Règlement n’interdit pas l’utilisation d’un tel fusil seulement s’il est chargé. Le critère est de savoir si le fusil de chasse peut contenir plus de trois cartouches, ce qui était le cas de ce fusil.

[12]       Bien qu’il soit surprenant que les activités d’une personne puissent répondre à la définition de « chasser » même si le fusil n’est pas chargé, l'objet de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs est énoncé à l’article 4 : « La présente loi a pour objet la mise en œuvre de la convention par la protection et la conservation des oiseaux migrateurs — individus et populations — et de leurs nids ». La définition de « chasser » énoncée dans le Règlement indique clairement qu’il n’est pas nécessaire de tuer, de prendre ou de blesser un oiseau migrateur pour qu’une activité corresponde à la définition de « chasser », et que les activités menées dans un lieu de chasse aux oiseaux migrateurs sont tout aussi importantes que les résultats (capturer, tuer, prendre, blesser ou harceler). Il est possible de pourchasser, de poursuivre, de traquer, de suivre, de capturer, de tuer, de prendre, de blesser ou de harceler un oiseau migrateur avec une arme déchargée.

[13]       Comme l’a affirmé le Tribunal dans la décision Sirois c. Canada (Environnement et Changement climatique), 2020 TPEC 6, «  il est clair que par l’entremise de la Loi, le législateur a créé un régime de responsabilité absolue, non de responsabilité stricte. La disposition clé à cet égard est l’article 11(1) de la Loi, selon lequel ni la diligence raisonnable ni la croyance à l’existence de faits qui, si vrais, exonéreraient le demandeur ne sont pas [sic] admissibles comme moyens de défense. En revanche, l’intention du demandeur n’est tout simplement pas pertinente » (au par 41). En l’espèce, M. Sallstrom détenait un permis de chasse et avait en sa possession un fusil de chasse non conformesur un lieu de chasse aux oiseaux migrateurs.

[14]       Le Tribunal juge que les activités de M. Sallstrom correspondent à la définition de « chasser ». M. Sallstrom était en possession d’un fusil de chasse et d’un permis de chasse dans un lieu de chasse aux oiseaux migrateurs considérés comme gibier. Il n’est pas nécessaire que des animaux aient réellement été blessés pour qu’une activité corresponde à la définition de « chasser ». De plus, le Tribunal conclut que la capacité du fusil de chasse de M. Sallstrom n’avait pas été réduite à un maximum de trois cartouches. Il est donc convaincu que le ministre a prouvé que M. Sallstrom a enfreint l’alinéa 37(3)b) du Règlement.

Conclusion

[15]       Le Tribunal conclut que le ministre s’est acquitté de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que M. Sallstrom était en possession d’un fusil de chasse non conformeet qu’il « chass[ait] les oiseaux migrateurs considérés comme gibier ». En conséquence, le Tribunal conclut que la violation prétendue dans le procès-verbal a bien été commise.

Pénalité

[16]       Selon le paragraphe 20(3) de la LPAME, le Tribunal est tenu de s’assurer que le montant de la pénalité applicable a été calculé correctement. Puisqu’il s’agit d’une violation de type B aux termes de la LPAME et du paragraphe 2(1) et de l’annexe 1 du Règlement, le montant de 400 $ est le montant de la pénalité le plus bas applicable à  la violation en l’espèce. M. Sallstrom n’a pas contesté le calcul du montant de la pénalité.

Décision

[17]       Le Tribunal maintient le procès-verbal no 9500-8258 et le montant de la pénalité.

Demande de révision rejetée

 

« Heather McLeod-Kilmurray »

HEATHER MCLEOD-KILMURRAY

RÉVISEURE

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