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Tribunal de la protection de l’environnement du Canada

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Environmental Protection Tribunal of Canada

 

Date de la décision :

Le 17 mai 2019

Référence :

Kost c. Canada (Environnement et Changement climatique Canada), 2019 TPEC 3

Numéros des dossiers du TPEC :

0002-2019 et 0003-2019

Intitulés :

Kost c. Canada (Environnement et Changement climatique Canada) (0002-2019); Distribution Carworx Inc. c. Canada (Environnement et Changement climatique Canada) (0003-2019)

Demandeurs :

Andrew Kost et Distribution Carworx Inc.

Défendeur :

Ministre d’Environnement et Changement climatique Canada

Objet de la procédure : Révisions, au titre  de l’article 256 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), LC 1999, c 33, d’un ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement délivré conformément à l’article 235 de cette loi relativement aux cas de contravention prévus aux paragraphes 3(1) et 3(2) du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile, DORS/2009-197, pris en vertu de la LCPE, et aux infractions prévues aux alinéas 272(1)h) et 272.1(1)f) de cette loi.

Date de l’audience :

Le 7 mai 2019 (par téléconférence)

Comparutions :

Parties

 

Avocats

Andrew Kost et Distribution Carworx Inc.

 

Anne-Marie Sheahan et Élise Théorêt

Ministre de l’Environnement et Changement climatique Canada

 

Sarom Bahk et Philippe Proulx (stagiaire en droit)

DÉCISION RENDUE PAR :

 

LESLIE BELLOC-PINDER

JERRY V. DEMARCO

PAMELA LARGE MORAN

 


Contexte

[1]           La présente décision statue sur les demandes présentées par les demandeurs, Andrew Kost et Distribution Carworx Inc. (« Carworx »), au Tribunal de la protection de l’environnement du Canada (« Tribunal ») pour des révisons de l’ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement no 8222-2018-09-18-8017 (« ordre d’exécution » ou « ordre ») donné par Environnement et changement climatique Canada (« ECCC ») le 28 janvier 2019.

[2]           L’ordre d’exécution a été délivré aux demandeurs par l’agent d’application de la loi d’ECCC Marc-André Cloutier en vertu de l’article 235 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), LC 1999, c 33 (« LCPE ») relativement à la violation alléguée des paragraphes 3(1) et 3(2) du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile, DORS/2009-197 (« Règlement ») pris en vertu de cette loi, et en vertu des alinéas 272(1)h) et 272.1(1)(f) de cette loi. Le Règlement établit des limites de concentration en COV pour les produits de finition automobile, comme les revêtements et les nettoyants de surface, lesquels sont énoncés dans une annexe. Le Règlement restreint la vente et l’importation de ces produits.

[3]           L’ordre d’exécution a été délivré à la suite d’une inspection des activités de Carworx tenue entre le 4 septembre 2018 et le 28 janvier 2019. Monsieur Kost est le président de Carworx. Carworx exerce des activités relativement à des produits de finition automobile ainsi qu’à des revêtements industriels. Carworx publie un catalogue des produits qu’elle propose à la vente. Les produits de Carworx comprennent des produits fabriqués en Espagne qui dépassent les limites de concentration de COV et qui, de ce fait, ne peuvent être vendus à des clients au Canada à des fins de finition automobile. Ils peuvent toutefois être vendus à des fins industrielles ou exportés, conformément aux exceptions prévues dans le Règlement.

[4]           Les demandeurs ont présenté leur demande conjointe de révision au Tribunal le 27 février 2019. Plus tôt dans le cadre de la présente instance et avec le consentement des parties, le réviseur-chef du Tribunal a ordonné la suspension partielle de l’ordre d’exécution dans l’attente d’une audience accélérée de la demande de révision principale. De plus, plus tôt dans le cadre de la présente instance et avec le consentement des parties, le Tribunal a identifié certains documents relatifs à la présente instance comme étant confidentiels. Ces documents sont conservés séparément du dossier public.

[5]           La présente décision statue sur le fond de la demande principale de révision. Étant donné qu’il s’agissait ici d’une instance accélérée et compte tenu du court délai prévu à l’article 266 de la LCPE pour rendre une décision, les présents motifs ne portent que sur les éléments de preuve et les observations les plus importants.

[6]           Le Tribunal a procédé à l’audience accélérée par téléconférence le 7 mai 2019 en se fondant sur les documents que les parties ont déposés avant la tenue de la téléconférence. ECCC demande que l’ordre d’exécution soit confirmé suivant l’alinéa 263a) de la LCPE, tandis que les demandeurs cherchent à le faire modifier suivant l’alinéa 263b). Aucune des parties ne demande que la durée de sa validité soit prorogée suivant l’alinéa 263c).

[7]           Pour les motifs énoncés ci-dessous, l’ordre d’exécution est modifié suivant l’alinéa 263b) de la LCPE.

Questions en litige

[8]           La question primordiale à trancher est celle de savoir si le Tribunal devrait confirmer ou modifier l’ordre d’exécution suivant l’article 263 de la LCPE. Les principales sous-questions consistent à déterminer s’il y a des motifs raisonnables de croire qu’une infraction à une disposition de la LCPE ou du Règlement a été commise par les demandeurs et, le cas échéant, quelles sont les mesures de l’ordre d’exécution qui sont justifiées en l’espèce et compatibles avec la protection de l’environnement et la sécurité publique, conformément à l’article 235 de la LCPE.

Lois et règlements pertinents

[9]           Les dispositions les plus pertinentes de la LCPE sont les suivantes :

235(1). Lors de l’inspection ou de la perquisition, l’agent de l’autorité qui a des motifs raisonnables de croire qu’une infraction à la présente loi ou aux règlements a été commise par une personne — et continue de l’être — ou le sera vraisemblablement, dans les cas prévus au paragraphe (2), peut ordonner à tout intéressé visé au paragraphe (3) de prendre les mesures prévues au paragraphe (4) et, s’il y a lieu, au paragraphe (5) qui sont justifiées en l’espèce et compatibles avec la protection de l’environnement et la sécurité publique pour mettre fin à la perpétration de l’infraction ou s’abstenir de la commettre.

256(1). Toute personne visée par l’ordre peut en demander la révision au réviseur-chef par avis écrit adressé dans les trente jours de la date où elle en reçoit le texte ou de celle où il lui est donné oralement.

257. Sur réception de l’avis de demande de révision, le réviseur-chef procède à la révision de l’ordre, notamment en tenant une audience, ou y fait procéder par le réviseur ou le comité composé de trois réviseurs qu’il désigne. Le réviseur-chef peut être membre de ce comité.

263. Après avoir examiné l’ordre, avoir donné aux intéressés et au ministre un avis écrit ou oral suffisant de la tenue d’une audience et leur avoir accordé la possibilité de lui présenter oralement leurs observations, le réviseur peut décider, selon le cas :

a) de le confirmer ou de l’annuler;

b) de modifier, suspendre ou supprimer une condition de l’ordre ou d’en ajouter une;

c) de proroger sa validité d’une durée équivalant au plus à cent quatre-vingts jours moins le nombre de jours écoulés depuis sa réception hors suspension.

272(1). Commet une infraction quiconque : […] h) contrevient à toute disposition des règlements désignée par les règlements pris en vertu de l’article 286.1 pour l’application du présent alinéa;

[10]        Les dispositions les plus pertinentes du Règlement sont les suivantes :

2(2). Le présent règlement ne s’applique pas aux produits de finition automobile visés à la colonne 1 de l’annexe qui sont :

a) fabriqués, importés, vendus ou mis en vente à des fins d’exportation;

b) utilisés pour être appliqués en atelier ou en usine — ou sur le site d’un atelier ou d’une usine — à des fins autres que la finition automobile, sur un produit autre qu’un véhicule automobile, de l’équipement mobile ou leurs pièces;

3(1). Il est interdit de fabriquer ou d’importer un produit de finition automobile visé à la colonne 1 de l’annexe dont la concentration en COV dépasse la concentration maximale prévue à la colonne 2 pour celui-ci, sauf dans les cas suivants :

a) le produit doit être dilué avant utilisation à une concentration en COV égale ou inférieure à la concentration maximale prévue à la colonne 2, et le fabricant, l’importateur ou le vendeur, selon le cas, indique les instructions de dilution sur l’étiquette du produit ou dans tout document accompagnant celui-ci, dans les deux langues officielles;

b) la personne qui fabrique ou importe est titulaire d’un permis délivré en application de l’article 5.

(2) Il est interdit de vendre ou de mettre en vente un produit de finition automobile visé à la colonne 1 de l’annexe dont la concentration en COV dépasse la concentration maximale prévue à la colonne 2, sauf dans les cas suivants :

a) le produit doit être dilué avant utilisation à une concentration en COV égale ou inférieure à la concentration maximale prévue à la colonne 2, et le fabricant, l’importateur ou le vendeur, selon le cas, indique les instructions de dilution sur l’étiquette du produit ou dans tout document accompagnant celui-ci, dans les deux langues officielles;

b) le produit a été fabriqué ou importé au titre d’un permis délivré en application de l’article 5, et la vente ou la mise en vente a lieu au plus tard un an après l’expiration du permis.

Discussion, analyse et conclusions

Questions préliminaires d’interprétation des lois

[11]        Deux questions générales d’interprétation des lois ont été soulevées par les parties dans leurs observations et débattues à l’audience. L’une porte sur l’interprétation de l’article 235 de la LCPE, et l’autre sur l’article 263.

[12]        S’agissant de l’article 235, les parties ne s’entendaient pas sur le niveau de preuve nécessaire pour justifier un ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement. Le paragraphe 235(1) utilise l’expression « motifs raisonnables de croire ». À cet égard, ECCC invoque l’arrêt Mugesera c. Canada (M.C.I.), 2005 RCS 40, au paragraphe 114 :

La première question que soulève l’al. 19(1)j) de la Loi sur l’immigration est celle de la norme de preuve correspondant à l’existence de « motifs raisonnables [de penser] » qu’une personne a commis un crime contre l’humanité. La CAF a déjà statué, à juste titre selon nous, que cette norme exigeait davantage qu’un simple soupçon, mais restait moins stricte que la prépondérance des probabilités applicable en matière civile […] La croyance doit essentiellement posséder un fondement objectif reposant sur des renseignements concluants et dignes de foi : […] (références omises)

[13]        Selon les demandeurs, la présente affaire est différente parce qu’elle porte sur d’autres lois, mais le Tribunal conclut que l’expression « motifs raisonnables de croire » devrait être interprétée de façon uniforme d’une loi à l’autre lorsqu’elle est utilisée pour décrire une norme de preuve régulièrement utilisée. Par conséquent, le Tribunal conclut que le raisonnement susmentionné de la Cour suprême du Canada s’applique également au paragraphe 235(1) de la LCPE. Comme il est indiqué au paragraphe 116 de l’arrêt Mugesera, cette norme s’applique aux questions de fait et est inférieure à la norme civile de preuve.

[14]        S’agissant de l’article 263, une autre question de droit se pose. Plus précisément : le Tribunal doit-il, dans le cadre d’une révision, limiter son examen à la question de savoir si l’agent d’application de la loi avait des motifs raisonnables et si les mesures étaient raisonnables compte tenu des circonstances dont l’agent avait connaissance à la date de son intervention ou doit-il tirer ses propres conclusions sur les motifs justifiant l’ordre ou sur les mesures appropriées à prendre en fonction des faits connus dont l’agent a témoigné et des témoignages supplémentaires fournis à l’audience relative à la révision? ECCC semblait reconnaître que l’examen du Tribunal n’était pas « figé dans le temps » à la date où l’ordre d’exécution a été donné, mais il renvoyait régulièrement dans ses observations aux circonstances dont l’agent avait connaissance au moment où l’ordre a été donné. Selon les demandeurs, le Tribunal n’est pas lié par les circonstances dont l’agent d’application de la loi avait connaissance au moment où l’ordre a été donné et il n’est pas tenu de s’en tenir aux mesures choisies par l’agent, même si ces mesures étaient raisonnables dans les circonstances dont l’agent avait connaissance à la date de son intervention.

[15]        Compte tenu des différentes positions des parties, il est important d’analyser le libellé de l’article 263 et des dispositions connexes. Différents types de « révisions » administratives sont prévues par diverses lois. Certaines révisions se limitent à l’examen du dossier dont était saisi le décideur initial et ne comportent pas l’audience habituelle où des observations sont présentées de vive voix, tandis que d’autres sont plus vastes et comportent une représentation orale de la preuve. Si le Parlement avait voulu que le Tribunal limite son examen aux seuls renseignements dont disposait l’agent au moment où l’ordre d’exécution a été délivré, le pouvoir d’assignation prévu à l’article 260, par exemple, aurait eu peu d’utilité. De plus, on ne trouverait pas à l’article 257 l’expression « procède à la révision de l’ordre, notamment en tenant une audience ». Les renvois dans la LCPE au droit des parties de comparaître en personne ou par l’entremise d’un représentant (article 259) et à la possibilité de présenter oralement des observations (article 263) auraient aussi vraisemblablement été exclus si le Parlement avait voulu que l’examen du dossier de révision par le Tribunal soit restreint. De plus, les articles 257 ou 263 auraient vraisemblablement été rédigés d’une manière qui énonce expressément que le Tribunal doit limiter son examen dans le cadre d’une révision aux seuls éléments de preuve qui faisaient partie du dossier dont était saisi l’agent d’application de la loi.

[16]        Par conséquent, suivant les principes de l’interprétation des lois, le Tribunal conclut que, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de prendre l’une des options prévues aux alinéas a), b) et c) de l’article 263, il peut tirer ses propres conclusions sur les motifs raisonnables ayant justifié l’ordre et sur les mesures raisonnables à partir du dossier complet de preuve dont il dispose. Le Tribunal peut donc, par exemple, modifier un ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement après avoir tenu une audience, même si les mesures qui y sont énoncées étaient raisonnables au moment où l’ordre a été délivré.

[17]        Bien que les demandeurs ont renvoyé à la jurisprudence sur les « normes de contrôle » applicables à la révision des décisions administratives par les tribunaux judiciaires, le Tribunal ne croit pas que cette jurisprudence s’applique à la question concernant le rôle du Tribunal énoncé à l’article 263. En l’espèce, le Tribunal examinera la preuve présentée à l’audience et l’appliquera aux critères énoncés à l’article 235 afin de déterminer si l’ordre d’exécution doit être confirmé et, dans l’affirmative, des mesures qui devraient y figurer. Si le mot « raisonnable » figure à l’article 235, il n’est toutefois pas utilisé de manière à créer une norme que le Tribunal doit appliquer pour évaluer la décision de l’agent. Le terme est utilisé pour décrire la norme de preuve applicable aux motifs et aux mesures appropriées.

[18]        Compte tenu de l’interprétation juridique ci-dessus, la question subsidiaire qui se pose en application de l’article 263 est la suivante : quels sont les éléments qui orientent le Tribunal lorsqu’il décide des pouvoirs à exercer en vertu de l’article 263? Dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire, le Tribunal est orienté par l’objectif de la Loi ainsi que par le libellé des dispositions à l’examen en l’espèce. De façon générale, la LCPE est une « [l]oi visant la prévention de la pollution et la protection de l’environnement et de la santé humaine en vue de contribuer au développement durable ». Le Tribunal exercera son pouvoir discrétionnaire de manière à favoriser l’atteinte de cet objectif législatif.

[19]        Des directives précises concernant les ordres d’exécution en matière de protection de l’environnement se trouvent à l’article 235, lequel énonce que des ordres peuvent être délivrés lorsqu’il y a des « motifs raisonnables » de croire qu’une infraction à la LCPE a été commise ou le sera vraisemblablement, comme l’indique le paragraphe 235(2). Par conséquent, un ordre ne sera donné que dans le cas où la preuve de la commission d’une infraction permet d’étayer l’existence de « motifs raisonnables ». Le Tribunal ne peut confirmer un ordre si la preuve ne satisfait qu’à la norme de « soupçon » d’une possible contravention. De plus, les mesures qui peuvent être prises sont prévues au paragraphe 235(4) (et au paragraphe 235(5), s’il y a lieu) et doivent être « justifiées en l’espèce et compatibles avec la protection de l’environnement et la sécurité publique ». Ces directives s’appliquent aux agents d’application de la loi en première instance et au Tribunal dans le cadre d’une audience en révision.

[20]        En outre, le libellé de l’article 265 encadre davantage le pouvoir discrétionnaire du Tribunal, de sorte qu’il ne peut, par exemple, exercer ses pouvoirs prévus à l’article 263 d’une manière qui entraînerait un danger pour la santé ou la sécurité de quiconque (alinéa 265c); voir également les alinéas 265a) et b) qui énoncent d’autres restrictions au pouvoir discrétionnaire).

[21]        Par conséquent, les principales tâches du Tribunal dans la présente affaire consistent à examiner s’il existe des motifs raisonnables de donner un ordre d’exécution et, dans l’affirmative, à déterminer quelles mesures sont justifiées dans les circonstances et compatibles avec la protection de l’environnement et la sécurité publique. Pour prendre sa décision, le Tribunal peut exercer les pouvoirs que lui confère l’article 263. Il a le pouvoir de modifier l’ordre, et c’est ce qu’il décide de faire en l’espèce.

Les mesures prévues dans l’ordre d’exécution

[22]        L’ordre d’exécution prévoit les mesures suivantes qui doivent être prises par les demandeurs :

[TRADUCTION]

1.         Dès que possible, mais au plus tard le 1er février 2019, cesser de vendre ou d’offrir en vente des produits de finition automobile contenant des composés organiques volatils (COV) dont la concentration est supérieure à la limite prévue à l’annexe du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile.

2.         Dès que possible, mais au plus tard le 1er février 2019, cesser d’importer des produits de finition automobile contenant des composés organiques volatils (COV) dont la concentration est supérieure à la limite prévue à l’annexe du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile.

3.         Dès que possible, mais au plus tard le 31 mars 2019, fournir à l’agent d’application de la loi soussigné une copie d’un plan de gestion environnementale (PGE) pour faire en sorte que Distribution Carworx lnc. respecte la LCPE et ses règlements (notamment le Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile, mais sans s’y limiter). Monsieur Andrew Kost doit approuver la copie (signature requise). Vous devez également fournir la liste des employés responsables du PGE, ainsi que la preuve qu’ils en ont reçu une copie et qu’ils l’ont lue.

4.         Dès que possible, mais au plus tard le 1er juillet 2019, récupérer auprès des distributeurs les produits vendus en violation du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile. Les produits doivent être entreposés dans une section identifiée de l’entrepôt situé au 3800, autoroute Félix-Leclerc, Pointe-Claire (Québec).

5.         Dès que possible, mais au plus tard le 26 juillet 2019, fournir à l’agent d’application de la loi soussigné un rapport sur la récupération des produits. Le rapport doit détailler les mesures que vous avez déployées, les destinataires et l’achèvement (notamment un inventaire complet des produits récupérés et leur origine). Monsieur Andrew Kost doit approuver la copie (signature requise).

6.         Dès que possible, mais au plus tard le 26 juillet 2019, procéder à la destruction ou à l’exportation en Espagne de tous les produits illégaux importés au Canada et récupérés (conformément au point no 4). Fournir à cette date (au plus tard) une preuve de destruction ou d’exportation à l’agent de l’autorité soussigné. Si la destruction est choisie, une entreprise autorisée doit l’effectuer (elle doit détenir l’autorisation ou les permis appropriés). Pour ce qui concerne la documentation, je fais référence à une ou plusieurs factures relatives au certificat de destruction (ou de traitement) OU à un ou plusieurs manifestes de transport.

Résumé des observations et des éléments de preuve relatifs aux motifs et mesures

[23]        Les parties ont déposé une preuve documentaire détaillée sous forme d’affidavits, de pièces écrites, d’images et d’enregistrements sonores. Elle était assortie d’observations écrites et orales détaillées renvoyant au dossier de preuve et au droit applicable.

[24]        Comme il est indiqué ci-dessus, l’ordre d’exécution ordonne aux demandeurs de prendre diverses mesures pour veiller à ce qu’ils cessent de vendre ou d’offrir en vente des produits de finition automobile contenant des COV à des concentrations supérieures à la limite établie dans l’annexe du Règlement. Les demandeurs ne contestent pas ces parties de l’ordre d’exécution (qui renvoient à certains numéros de produits) énumérées au paragraphe 25 de leurs observations écrites. En ce qui concerne les autres produits décrits dans la partie intitulée [traduction] « Faits pertinents » de l’ordre d’exécution, les demandeurs contestent l’ordre d’exécution. Essentiellement, les demandeurs veulent que les mesures soient limitées dans leur application aux seuls numéros de produits énumérés dans les parties de l’ordre d’exécution qu’ils ne contestent pas. Ils demandent également la correction d’un numéro de produit mentionné au paragraphe 24 de la partie de l’ordre relative aux faits. Ils cherchent également à obtenir plus de temps pour terminer le plan de gestion environnementale.

[25]        Les demandeurs cherchent à faire modifier l’ordre d’exécution tant en ce qui concerne les « faits » qui y sont énoncés que les « mesures » qui doivent être prises. Ils s’opposent à l’approche générale des mesures 1 et 2 et demandent que les mesures soient limitées à une liste de produits interdits précis qui sont mentionnés dans certaines parties de la section de l’ordre portant sur les faits. Par exemple, ils cherchent à faire modifier les mesures 1 et 2 par l’ajout, entre autres, de ce qui suit :

[TRADUCTION]

Les mesures de cessation de la vente, de mise en vente et d’importation ne s’appliquent qu’aux produits qui figurent aux paragraphes 10, 11, 12, 13, 16, 17, 24, 25, 28, 29, 30 et 31 des FAITS PERTINENTS ...

[26]        À l’appui des modifications proposées à l’ordre d’exécution, les demandeurs soulèvent quatre questions dans leurs observations écrites. Les observations écrites d’ECCC abordent chacune de ces questions. Les questions soulevées par les parties peuvent se résumer ainsi :

  1. Certains produits ont-ils été vendus uniquement à des clients aux États-Unis?
  2. Certains produits ont-ils été vendus uniquement à des clients sensibilisés ayant reçu une autorisation préalable? Était-il impossible de commander ces produits sur le site Web des demandeurs? Ces produits étaient-ils vendus pour un usage industriel seulement?
  3. La vente de certains produits figurant dans l’ordre d’exécution avait-elle cessé et les produits étaient-ils non disponibles sur le marché?
  4. En quoi les efforts continus des demandeurs pour se conformer à certains aspects du Règlement influent-ils sur la présente révision?

i) Certains produits ont-ils été vendus uniquement à des clients aux États-Unis?

[27]        Les demandeurs soutiennent que leurs dossiers de ventes internes et leurs listes de prix établissent que les produits figurant aux paragraphes 2-9, 14-15, 18-23 et 26-27 de l’ordre d’exécution ont été vendus uniquement à des clients américains (bien que les demandeurs admettent également que deux produits ont été envoyés par erreur à un client au Canada). Les demandeurs sollicitent le retrait des produits américains dans l’ordre d’exécution.

[28]        ECCC soutient que les demandeurs, en offrant de vendre certains produits, n’ont pas pris suffisamment de mesures pour faire connaître les restrictions sur certains produits ou souligner que ces produits n’étaient pas disponibles sur le marché canadien. Malgré le fait que les demandeurs ont affirmé que leur site Web ou leur catalogue contiendrait un « addenda » mentionnant les produits non disponibles au Canada, cette clarification n’a pas été fournie, au plus tard, à la date de la délivrance de l’ordre d’exécution. De plus, ECCC n’accepte pas les raisons fournies par les demandeurs pour expliquer pourquoi deux produits ont été livrés par erreur à un client canadien et il fait remarquer que deux clients différents étaient en cause. ECCC soutient également que la preuve présentée par les demandeurs selon laquelle certains produits ont été vendus à des clients américains ne signifie pas qu’ils ont été vendus exclusivement à des clients à l’extérieur du Canada. Enfin, ECCC fait remarquer que les produits non conformes étaient encore entreposés pour la vente au Canada, ce qui constitue également une infraction au Règlement.

ii) Certains produits ont-ils été vendus uniquement à des clients sensibilisés ayant reçu une autorisation préalable? Était-il impossible de commander ces produits sur le site Web des demandeurs? Ces produits étaient-ils vendus pour un usage industriel seulement?

[29]        Selon les demandeurs, il est [traduction] « impossible » pour quiconque de commander des produits à partir de leur site Web et, en conséquence, l’entreprise peut contrôler sélectivement la distribution de ses produits. Les demandeurs font remarquer que l’entreprise ne vend des produits qu’à des clients ayant reçu une autorisation préalable qui ont d’abord reçu la visite d’un représentant de l’entreprise, lequel les interroge sur l’usage auquel les produits particuliers sont destinés.

[30]        Les demandeurs indiquent également que les produits figurant aux paragraphes 32 à 35, 36 (produit no 213.9005 seulement), 37 et 39 à 42 de l’ordre d’exécution sont des [traduction] « produits industriels [...] à des fins autres que la finition automobile », et ils soutiennent que la preuve établissant que ces produits ont été offerts en vente ou vendus pour la finition automobile est insuffisante. Les demandeurs affirment plutôt que les produits ont été vendus à d’autres fins et qu’ils devraient être retirés de l’ordre d’exécution.

[31]        ECCC s’oppose à ce que les étiquettes des produits contenant les mots [traduction] « industriel » ou « à usage industriel seulement » mènent directement à la conclusion qu’ils relèvent de l’exception prévue à l’alinéa 2(2)b) du Règlement. Le ministre affirme que chacun des produits a été vendu au Canada à des fins de [traduction] « finition automobile » et renvoie à leurs fiches techniques, qui non seulement décrivent les utilisations automobiles, mais démontrent également des concentrations de COV supérieures aux limites établies à l’annexe.

[32]        ECCC affirme également que les demandeurs n’ont jamais précisé l’existence du processus d’approbation préalable des clients de Carworx, même s’ils ont eu l’occasion de le faire à l’étape de l’inspection et après l’avis d’intention d’ECCC de donner l’ordre d’exécution.

iii) La vente de certains produits figurant dans l’ordre d’exécution avait-elle cessé et les produits étaient-ils non disponibles sur le marché?

[33]        Les demandeurs soutiennent que certains produits figurant dans l’ordre d’exécution n’étaient plus disponibles sur le marché et qu’en conséquence, ils devraient être retirés de l’ordre. Selon ECCC, il était indiqué sur le site Web et dans le catalogue des demandeurs que tous les produits notés étaient disponibles pour la vente, et ce jusqu’à la date de la délivrance de l’ordre d’exécution. De plus, les listes de prix annexées à l’affidavit de M. Kost indiquent que plusieurs des produits y figurant ne sont plus vendus.

iv) En quoi les efforts continus des demandeurs pour se conformer à certains aspects du Règlement influent-ils sur la présente révision?

[34]        Bien qu’ils ne font aucune admission quant à leur responsabilité générale dans le contexte de la présente instance en révision, les demandeurs sont prêts à se conformer à certains aspects de l’ordre d’exécution tout en contestant d’autres aspects. Les demandeurs soutiennent qu’ils améliorent les contrôles internes et les pratiques de gestion, qu’ils apportent des précisions sur le site Web et dans le catalogue de Carworx et qu’ils informent leurs clients des exigences réglementaires. Ils ont aussi commencé à recueillir des renseignements et des documents exigés dans l’ordre d’exécution. Les demandeurs ajoutent que Carworx se consacre actuellement à élaborer le plan de gestion environnementale, à vérifier si des produits ont été vendus en contravention du Règlement et à les récupérer s’ils l’ont été. ECCC ne s’oppose pas à ces engagements ou initiatives, si ce n’est pour faire valoir que la modification ou les corrections du catalogue et du site Web pourraient ne pas encore être suffisantes. Les parties semblent reconnaître qu’un dialogue continu sera nécessaire pour que les demandeurs arrivent à se conformer aux obligations réglementaires au fil du temps. Cela dit, leurs points de vue divergent quant aux mesures appropriées à prendre dans l’ordre d’exécution.

Analyse des motifs et des mesures

[35]        Bon nombre des observations qui précèdent sont pertinentes pour démontrer le caractère raisonnable des motifs de l’ordre d’exécution, le caractère raisonnable des mesures qui y figurent ou la compatibilité de ces mesures avec la protection de l’environnement et la sécurité publique. Plutôt que d’examiner les questions en fonction des quatre catégories proposées par les parties, le Tribunal effectuera son analyse ci-dessous en fonction des éléments clés de l’article 235.

[36]        Comme nous le verrons plus loin, le Tribunal a choisi de ne pas formuler les mesures 1 et 2 de façon aussi large que le libellé de l’ordre d’exécution délivré ni aussi étroite que le proposent les demandeurs (selon qui les mesures ne seraient liées qu’à des numéros de produits précis mentionnés dans une version modifiée de la partie intitulée [traduction] « Faits pertinents » de l’ordre). Si le Tribunal avait retenu cette dernière approche, son analyse des questions en litige aurait repris les catégories de questions proposées par les parties. Toutefois, étant donné que le Tribunal adopte une approche différente de celle adoptée par l’une ou l’autre partie, il a choisi d’utiliser le libellé de l’article 235 pour le guider dans son analyse qui suit.

i) Motifs raisonnables

[37]        Existe-t-il des motifs raisonnables de croire qu’une infraction à la LCPE ou au Règlement a été commise, ou le sera vraisemblablement, dans les cas prévus au paragraphe 235(2)? En l’espèce, les contraventions reprochées concernent l’importation de certaines substances et la vente de ces substances, comme l’indique le Règlement. Les interdictions générales prévues dans le Règlement font toutefois l’objet de deux exceptions pertinentes. Si les substances sont importées en vue d’une exportation ultérieure, il n’y a pas de contravention. De même, si les substances sont distribuées au Canada à des fins industrielles qui ne sont pas liées à la finition des véhicules automobiles (au sens large du Règlement), il n’y a pas de contravention non plus.

[38]        Pour chaque numéro de produit, la preuve varie quant aux motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise. Dans certains cas, il y a suffisamment d’éléments de preuves pour conclure à l’existence de motifs raisonnables. Dans d’autres situations, c’est plus discutable. Bien que les parties aient fourni des éléments de preuve et des observations détaillés relativement à chaque numéro de produit ou groupe de numéros de produit, le Tribunal estime que l’article 235 n’exige pas ce genre d’analyse spécifique (et, en conséquence, la preuve des détails fournis relativement à chaque produit n’est pas résumée dans la présente décision). La partie liminaire du paragraphe 235(1) porte sur la preuve de la commission d’une infraction (actuelle ou vraisemblable). Des éléments de preuve démontrant l’existence de motifs raisonnables de croire qu’une infraction, visant toute disposition de la LCPE ou de ses règlements, a été commise (ou le sera vraisemblablement) dans les cas de contravention prévus au paragraphe 235(2) suffisent pour justifier un ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement. Le Tribunal n’a pas à examiner chaque allégation concernant chaque numéro de produit ou groupe de produits comme s’il s’agissait de « chefs » distincts dans une poursuite. Le Tribunal est plutôt chargé d’examiner les éléments de preuve relatifs à la commission d’une infraction (actuelle ou vraisemblable) relativement à toute disposition de la LCPE ou du Règlement.

[39]        En l’espèce, cette étape de l’analyse est simple parce que les demandeurs admettent volontiers qu’ils ont distribué par erreur deux produits réglementés au Canada même si cela est interdit par le Règlement. Cette admission prouve l’existence des cas de contravention prévus aux alinéas 235(2)a) ou b), et permet de satisfaire au critère des « motifs raisonnables de croire » énoncé au paragraphe 235(1). Le Tribunal accepte également que plusieurs autres parties du témoignage de M. Cloutier répondent à cette norme. Par exemple, la distribution au Canada de produits dont l’utilisation est interdite dans le secteur de la finition automobile a été faite à des entités qui font clairement partie de ce secteur d’activité plutôt qu’à d’autres entreprises industrielles qui sont assujetties à l’exception industrielle prévue par le Règlement. Cet élément est également suffisant pour prouver l’existence de motifs raisonnable de croire qu’une infraction a été commise. De même, les activités des demandeurs consistant à « offrir de vendre » des produits de finition automobile par l’entremise de leur catalogue et de leur site Web sans restreindre ces offres aux clients à l’extérieur du Canada constituaient également un élément suffisant pour prouver l’existence de motifs raisonnable de croire qu’une infraction au Règlement a été commise. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’analyser d’autres situations où la preuve est moins manifeste ou lorsque les témoignages par affidavit de chaque partie se contredisent. La preuve dont dispose le Tribunal permet de satisfaire au premier volet de l’analyse fondée sur l’article 235.

ii) Caractère raisonnable des mesures

[40]        Le paragraphe 235(1) exige également que les mesures soient « justifiées en l’espèce ». En ce qui concerne la mesure 3 (c.-à-d. le plan de gestion environnementale ou PGE), ECCC a accédé à la demande des demandeurs de reporter la date limite pour cette mesure à 15 jours après le prononcé de la présente décision. Le Tribunal convient que cette demande est raisonnable dans les circonstances, d’autant plus que la mesure 3 a fait l’objet d’une suspension plus tôt dans la présente instance. Il est donc raisonnable de donner aux demandeurs un délai supplémentaire pour réaliser cette mesure.

[41]        La situation est différente pour les mesures 1, 2 et 6. Comme il a été mentionné plus haut, les parties adoptent des approches très différentes quant au libellé de ces mesures. ECCC propose de conserver le très large libellé actuel, tandis que les demandeurs proposent une liste ciblée de substances interdites dans les mesures 1 et 2 et une approche plus souple pour la mesure 6. Le Tribunal opte pour une approche différente pour les mesures 1 et 2 qui, à son avis, convient le mieux aux enjeux actuels entre les demandeurs et ECCC et qui serait raisonnable dans les circonstances particulières de l’espèce. Le Tribunal reprend en grande partie les modifications proposées par les demandeurs à la mesure 6.

[42]        Le Tribunal conclut que le PGE sera un élément essentiel dans le règlement des différends qui opposent ECCC et les demandeurs de façon continue. Il n’est pas possible pour le Tribunal, à ce stade-ci, de prédire avec exactitude quels numéros de produits pourraient donner lieu à des problèmes de conformité à l’avenir. Un PGE bien conçu sera essentiel à la mise en place de mesures de protection adéquates pour assurer la conformité à l’avenir. Le Tribunal invite les parties à travailler de façon constructive à la mise en œuvre du PGE, de manière à ce qu’aucun autre ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement ou mesure d’application ne soit nécessaire. L’élaboration et la mise en œuvre du PGE constituent un moyen approprié pour éviter d’éventuelles contraventions.

[43]        Le Tribunal conclut qu’il y a lieu de modifier les mesures 1 et 2. ECCC affirme que les exceptions prévues par le Règlement (notamment en ce qui concerne l’exportation et l’utilisation industrielle) continuent de s’appliquer (une question qui a été abordée récemment par l’agent d’application de la loi et dans l’entente des parties concernant la suspension partielle de l’ordre d’exécution), mais le Tribunal conclut que le libellé actuel des mesures 1 et 2 pourrait raisonnablement être interprété de façon à ce que les demandeurs ne puissent se prévaloir des exceptions prévues au Règlement pendant la période de validité de l’ordre. Le Tribunal convient qu’une telle interprétation du libellé actuel est tout à fait possible, même si elle n’était pas prévue. Le Tribunal conclut qu’il n’est pas nécessaire d’adopter une approche aussi large et imprécise à l’égard des mesures, d’autant plus qu’ECCC admet volontiers qu’il n’avait pas l’intention que les mesures 1 et 2 l’emportent sur les exceptions prévues par le Règlement.

[44]        Un aspect de la solution proposée par les demandeurs pour remédier au manque de clarté des mesures 1 et 2 consiste à reformuler substantiellement l’ordre d’exécution, notamment la partie intitulée [traduction] « Faits pertinents », de sorte que seuls certains numéros de produits soient visés par les interdictions des mesures 1 et 2. Le Tribunal ne souscrit pas à cette approche, mais il convient que le problème sous-jacent relevé par les demandeurs existe (c.-à-d. que les mesures 1 et 2 sont formulées de façon si générale qu’il n’est pas clair que les demandeurs sont légalement autorisés à se prévaloir des exceptions prévues dans le Règlement pendant la période de validité de l’ordre d’exécution). À cet égard, les demandeurs souhaitent que les mesures 1 et 2 soient clarifiées afin qu’elles ne s’appliquent que dans la mesure où la vente, l’offre de vente et l’importation contreviennent au Règlement. Le Tribunal retient cette observation générale.

[45]        Comme l’exige la LCPE, l’ordre d’exécution vise à assurer la conformité au Règlement (voir les derniers mots du paragraphe 235(1) : « … pour mettre fin à la perpétration de l’infraction ou s’abstenir de la commettre »). L’ordre d’exécution n’a pas pour but d’empêcher les demandeurs visés de se livrer à des activités que d’autres entités réglementées continueraient d’être autorisées à exercer en raison des exceptions prévues dans le Règlement, comme l’exportation ou la distribution pour usage industriel. Aucune preuve ne démontre la nécessité de mettre fin aux activités des demandeurs qui seraient normalement autorisées en raison des exceptions prévues par le Règlement. Il est plutôt nécessaire de relever les activités qui sont interdites par le Règlement et pour lesquelles aucune exception ne s’applique. Par conséquent, le Tribunal conclut que relativement aux mesures 1 et 2, il est raisonnable de modifier leur libellé de manière à préciser clairement que les demandeurs doivent se conformer entièrement au Règlement, mais qu’ils peuvent continuer à exporter ou à distribuer des produits aux utilisateurs industriels conformément aux exceptions prévues par le Règlement. Le Tribunal a donc modifié les mesures 1 et 2 pour atteindre cet objectif, de la manière indiquée à la fin de la présente décision. Le Tribunal estime que ces modifications sont raisonnables dans les circonstances.

[46]        Il convient de noter que les demandeurs ont également demandé une modification des mesures 1 et 2 de sorte que leur date limite soit la date de la présente décision plutôt que le 1er février 2019. Étant donné l’approche choisie par le Tribunal pour modifier les mesures 1 et 2, le Tribunal conclut qu’aucune date limite n’est maintenant requise pour les mesures 1 et 2. L’obligation de se conformer au Règlement existait avant la délivrance de l’ordre d’exécution, existe toujours pendant sa période de validité et continuera d’exister après son expiration.

[47]        La mesure 6 comporte également le même problème potentiel que les mesures 1 et 2, en ce sens que son libellé peut avoir pour effet d’imposer d’autres restrictions que les contraventions. Comme l’ont fait remarquer les demandeurs, il n’est pas nécessaire de restreindre l’exportation de substances uniquement à leur point d’origine (c.-à-d. l’Espagne). Elles peuvent être légalement exportées ailleurs conformément à l’exception prévue dans le Règlement. De même, elles peuvent être distribuées à des fins industrielles au Canada (plutôt que pour la finition de véhicules automobiles) en vertu de l’autre exception prévue au Règlement. Le Tribunal a donc modifié la mesure 6 afin que les demandeurs puissent continuer de se prévaloir des exceptions prévues par le Règlement. Le Tribunal conclut que ces modifications, telles qu’énoncées à la fin de la présente décision, sont raisonnables dans les circonstances.

[48]        Il convient de noter que le Tribunal a également apporté des améliorations mineures au libellé des mesures modifiées afin de les rendre plus claires. Le texte intégral des mesures modifiées 1, 2, 3 et 6 figure ci-après.

iii) Compatibilité des mesures avec la protection de l’environnement et la sécurité publique

[49]        Comme l’énonce le paragraphe 235(1), les mesures prévues dans un ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement doivent également être « compatibles avec la protection de l’environnement et la sécurité publique ». Cela correspond à l’objectif général de la LCPE. Les mesures prévues dans l’ordre d’exécution, telles que modifiées par la présente décision, s’en tiennent à limiter les émissions de COV.

[50]        Le Tribunal retient le témoignage d’Alexander Cavadias selon lequel la pollution atmosphérique cause de graves effets sur la santé au Canada, tels des milliers de décès prématurés, d’hospitalisations et de visites à l’urgence chaque année. Le Tribunal retient également la preuve que la pollution atmosphérique peut également avoir des effets néfastes sur l’environnement. Monsieur Cavadias souligne que les COV sont des polluants précurseurs de l’ozone troposphérique et des matières particulaires et que, par conséquent, ils ont été ajoutés à la liste des substances toxiques de la LCPE.

[51]        Il est possible de réduire considérablement les COV en limitant au minimum l’utilisation de solvants. Des solvants sont ajoutés aux produits de finition automobile. Des COV sont émis lors de l’application de ces produits. Le Règlement constitue une stratégie pour atteindre l’objectif de réduire au minimum l’utilisation de solvants et, dans la mesure où l’ordre d’exécution vise à promouvoir la conformité au Règlement, il est possible de conclure qu’il est « compatible[s] avec la protection de l’environnement et la sécurité publique ». Par conséquent, cet aspect de l’article 235 est respecté selon les faits en l’espèce.

iv) Mesures autorisées

[52]        Il convient également de noter que la nature des mesures énoncées dans l’ordre d’exécution, modifié ci-dessous, est clairement visée par la portée des mesures énoncées au paragraphe 235(4) de la LCPE.

v) Partie intitulée [traduction] « Faits pertinents » de l’ordre d’exécution

[53]        Comme indiqué ci-dessus, les demandeurs proposent des changements à la partie intitulée [traduction] « Faits pertinents » de l’ordre d’exécution. Cette partie de l’ordre compte dix pages. Bien que le Tribunal n’exclue pas complètement la possibilité de modifier les parties concernant les faits d’un ordre d’exécution en matière de protection de l’environnement à l’avenir (dans la mesure où la nécessité en était démontrée et dans la mesure où ces parties étaient visées par une « condition » au sens de l’alinéa 263b) de la LCPE), il a décidé de ne pas le faire en l’espèce et ce, pour deux raisons.

[54]        Premièrement, la présente affaire s’est déroulée sous forme de procédure accélérée où était examinée une preuve par affidavit dont les auteurs ne pouvaient être soumis à un contre-interrogatoire. Le Tribunal a reçu de nombreux éléments de preuve pour s’acquitter de son obligation, prévue par la loi, de procéder à la révision demandée, mais il ne voit aucune utilité à tenter de régler tous les différends entre les parties reposant sur les faits contestés et, en conséquence, à apporter des modifications à la partie intitulée [traduction] « Faits pertinents ». Cette partie de l’ordre d’exécution résume les raisons qui ont motivé l’agent d’application de la loi à imposer des mesures. La présente décision expose les raisons qui ont motivé le Tribunal à modifier certaines de ces mesures. Il n’est pas nécessaire de modifier les motifs de l’agent d’application de la loi, car ils constituent un résumé adéquat de ce qu’il croyait au moment où l’ordre d’exécution a été donné.

[55]        Deuxièmement, les modifications proposées par les demandeurs à la partie intitulée [traduction] « Faits pertinents » de l’ordre d’exécution s’inscrivaient dans le cadre de leur démarche globale visant à faire modifier l’ordre de manière à ce qu’il ne s’applique qu’à certains numéros de produits. Cette démarche consistait notamment à faire en sorte que les mesures renvoient à certains paragraphes des « Faits pertinents » et les incorporent par renvoi, de manière à en faire des « conditions » de l’ordre. Le Tribunal a choisi une approche différente pour modifier l’ordre d’exécution dans un souci de clarté et estime qu’il n’est pas nécessaire que les mesures modifiées renvoient à certains paragraphes de la partie intitulée « Faits pertinents ». Les mesures, modifiées en l’espèce, sont autonomes et n’incorporent par renvoi aucun des paragraphes de la partie intitulée « Faits pertinents » de l’ordre d’exécution.

Décision

[56]        Le Tribunal accueille en partie la demande de révision. Conformément à l’alinéa 263b) de la LCPE, l’ordre d’exécution est modifié en remplaçant les mesures 1, 2, 3 et 6 par ce qui suit (les mesures 4 et 5 ne sont pas modifiées et demeurent en vigueur telles quelles) :

1.         Sauf dans les cas où une exception prévue au paragraphe 2(2) du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile s’applique, cesser de vendre ou d’offrir en vente des produits de finition automobile contenant des composés organiques volatils (COV) en concentration supérieure à la limite prévue à l’annexe du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile.

2.         Sauf dans les cas où une exception prévue au paragraphe 2(2) du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile s’applique, cesser d’importer des produits de finition automobile contenant des composés organiques volatils (COV) en concentration supérieure à la limite prévue à l’annexe du Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile.

3.         Au plus tard 15 jours après le prononcé de la décision du Tribunal de la protection de l’environnement du Canada dans les dossiers nos 0002-2019 et 0003-2019 du TPEC, fournir à l’agent de l’autorité soussigné une copie d’un plan de gestion environnementale (PGE) pour faire en sorte que Distribution Carworx lnc. respecte la LCPE et ses règlements (notamment le Règlement limitant la concentration en composés organiques volatils (COV) des produits de finition automobile, mais sans s’y limiter). Monsieur Andrew Kost doit approuver la copie (signature requise). Vous devez également fournir la liste des employés responsables du PGE, ainsi que la preuve qu’ils en ont reçu une copie et qu’ils l’ont lue.

6.         Dès que possible, mais au plus tard le 26 juillet 2019, procéder à la destruction, à l’exportation légale ou à la vente légale au Canada pour usage industriel de tous les produits importés au Canada et récupérés (conformément au point 4). Fournir à cette date (au plus tard) une preuve de la destruction, de l’exportation légale ou de la vente légale au Canada à des fins industrielles à l’agent de l’autorité soussigné. Si la destruction est choisie, une entreprise autorisée doit l’effectuer (avec l’autorisation ou les permis appropriés). Pour ce qui concerne la documentation, je fais référence à une ou plusieurs factures relatives au certificat de destruction (ou de traitement), à un ou plusieurs manifestes de transport ou aux autres documents que j’estime acceptables


La demande de révision est accueillie en partie

L’ordre d’exécution est modifié.

 

« Leslie Belloc-Pinder »

LESLIE BELLOC-PINDER

RÉVISEURE

« Jerry V. DeMarco »

JERRY V. DEMARCO

RÉVISEUR-CHEF

« Pamela Large Moran »

PAMELA LARGE MORAN

RÉVISEURE

 

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